bonjour tristesse 03

2022-09-25 18:38:4008:04 30
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Quand Cyrilme quitta, il m'offrit de m'apprendre la navigation à voile. Je rentrai dîner,très absorbée par sa pensée, et ne participai pas, ou peu, à la conversation;c'est à peine si je remarquai la nervosité de mon père. Après dîner, nous nousallongeâmes dans des fauteuils, sur la terrasse, comme tous les soirs.

Le cielétait éclaboussé d'étoiles. Je les regardais, espérant vaguement qu'ellesseraient en avance et commenceraient à sillonner le ciel de leur chute. Maisnous n'étions qu'au début de juillet, elles ne bougeaient pas.

Dans lesgraviers de la terrasse, les cigales chantaient. Elles devaient être desmilliers, ivres de chaleur et de lune, à lancer ainsi ce drôle de cri des nuitsentières.

On m'avaitexpliqué qu'elles ne faisaient que frotter l'une contre l'autre leurs élytres,mais je préférais croire à ce chant de gorge guttural, instinctif comme celuides chats en leur saison. Nous étions bien; des petits grains de sable entre mapeau et mon chemisier me défendaient seuls des tendres assauts du sommeil.

C'est alorsque mon père toussota et se redressa sur sa chaise longue.

«J'ai unearrivée à vous annoncer», dit-il.       

Je fermailes yeux avec désespoir. Nous étions trop tranquilles, cela ne pouvait durer!

«Dites-nousvite qui, cria Eisa, toujours avide de mondanités.

Anne Larsen», dit mon père, et il se tourna vers moi.

Je leregardai, trop étonnée pour réagir. «Je lui ai dit de venir si elle était tropfatiguée par ses

collectionset elle... elle arrive.»

Je n'yaurais jamais pensé. Anne Larsen était une ancienne amie de ma pauvre mère etn'avait que très peu de rapports avec mon père. Néanmoins à ma sortie depension, deux ans plus tôt, mon père, très embarrassé de moi, m'avait envoyée àelle. En une semaine, elle m'avait habillée avec goût et appris à vivre.

J'en avaisconçu pour elle une admiration passionnée qu'elle avait habilement détournéesur un jeune homme de son entourage. Je lui devais donc mes premières éléganceset mes premières amours et lui en avais beaucoup de reconnaissance.

 A quarante-deux ans, c'était une femme trèsséduisante, très recherchée, avec un beau visage orgueilleux et las,indifférent. Cette indifférence était la seule chose qu'on pût lui reprocher.Elle était aimable et lointaine. Tout en elle reflétait une volonté constante,une tranquillité de cœur qui intimidait. Bien que divorcée et libre, on ne luiconnaissait pas d'amant. D'ailleurs, nous n'avions pas les mêmes relations:elle fréquentait des gens fins, intelligents, discrets, et nous des gens bruyants,assoiffés, auxquels mon père demandait simplement d'être beaux ou drôles. Jecrois qu'elle nous méprisait un peu, mon père et moi, pour notre parti prisd'amusements, de futilités, comme elle méprisait tout excès. Seuls nousréunissaient des dîners d'affaires — elle s'occupait de couture et mon père depublicité —, le souvenir de ma mère et mes efforts, car, si elle m'intimidait,je l'admirais beaucoup. Enfin cette arrivée subite apparaissait comme uncontretemps si l'on pensait a la présence d'Eisa et aux idées d'Anne surl'éducation.

Eisa montase coucher après une foule de questions sur la situation d'Anne dans le monde.Je restai seule avec mon père et vins m'asseoir sur les marches, à ses pieds.Il se pencha et posa ses deux mains sur mes épaules:

«Pourquoies-tu si efflanquée, ma douce? Tu as l'air d'un petit chat sauvage. J'aimeraisavoir une belle fille blonde, un peu forte, avec des yeux en porcelaine et...

Laquestion n'est pas là, dis-je. Pourquoi as-tu invité Anne? Et pourquoi a-t-elleaccepté?

Pour voir ton vieux père, peut-être. On ne sait jamais.

Tun'es pas le genre d'hommes qui intéresse Anne, dis-je. Elle est tropintelligente, elle se respecte

trop. EtEisa? As-tu pensé à Eisa? Tu t'imagines les conversations entre Anne et Eisa?Moi pas!

Jen'y ai pas pensé, avoua-t-il. C'est vrai que c'est épouvantable. Cécile, madouce, si nous retournions à Paris?» Il riait doucement en me frottant lanuque. Je me retournai et le regardai. Ses yeux sombres brillaient, des petitesrides drôles en marquaient les bords, sa bouche se retroussait un peu. Il avaitl'air d'un faune. Je me mis à rire avec lui, comme chaque fois qu'il s'attiraitdes complications.

«Mon vieuxcomplice, dit-il. Que ferais-je sans toi?»

Et le tonde sa voix était si convaincu, si tendre, que je compris qu'il aurait étémalheureux. Tard dans la nuit, nous parlâmes de l'amour, de ses complications.Aux yeux de mon père, elles étaient imaginaires. Il refusait systématiquementles notions de fidélité, de gravité, d'engagement. Il m'expliquait qu'ellesétaient arbitraires, stériles. D'un autre que lui, cela m'eût choquée. Mais jesavais que dans son cas, cela n'excluait ni la tendresse ni la dévotion,sentiments qui lui venaient d'autant plus facilement qu'il les voulait, les savaitprovisoires. Cette conception me séduisait: des amours rapides, violentes etpassagères. Je n'étais pas à l'âge où la fidélité séduit. Je connaissais peu dechose de l'amour: des rendez-vous, des baisers et des lassitudes.



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