39.我听见姑妈在隔壁房间里低声自言自语

2023-10-16 09:21:4704:06 746
声音简介

我听见姑妈在隔壁房间里低声地自言自语。她说话一向声音很轻,因为她总觉得自己脑子里有样什么东西碎了,来回晃荡着,她要是话说得太响,它就会挪开去的,然而她即便独自一个人待着,也没法长时间熬住不说话,因为她觉得说说话对保护嗓子有好处,能防止喉咙淤血,对她常犯的胸闷心慌毛病也有缓解作用;再说,她整天生活在一种不活动的状态中,所以把自己哪怕一丁半点的感觉都看得极其重要;这些感觉被她赋予了一种运动机能,弄得她自己都很难留住它们,而由于没有知心的人可以交流,她就对着自己诉说这些感觉,这种经常的自言自语成了她惟一的活动方式。遗憾的是,她有了这个想到哪说到哪的习惯以后,有时就顾不得隔壁房间有没有人了,我常听见她自言自语地说:“我可得记住,我刚才没睡觉哦。”(因为,从不睡觉是她最引以为荣的事情,我们平日里说起话来都很火烛小心,有些字眼是要避讳的:每天早上弗朗索瓦兹不是去叫醒她,而是上她屋里去;每当姑妈在白天想打个盹儿的时候,大家就说她要静一静或者养养神;要是碰巧她一时忘乎所以,脱口说出“把我吵醒了”或者“我梦见什么什么”之类的话,她马上会脸涨得通红,忙不迭地改口。)
等了一会儿,我进去吻她,向她问安,弗朗索瓦兹给她沏茶。要是姑妈觉得情绪有些激动的话,就会吩咐以药代茶,这时就由我负责把一撮椴花茶从药袋倒在一只盆子里,随后别人再把它们放进开水杯里去。干枯的茶梗弯弯曲曲地组成一幅构图匪夷所思的立体图案,在虬曲盘绕的网络中间,绽开着一朵朵色泽幽淡的小花,仿佛是由哪位画家精心安排,有意点缀上去的。叶片由于失去了,或者说改变了原来的模样,看上去就像是杂沓的不协调的东西,有的宛如飞虫透明的翅翼,有的恰似标签白色的背面,有的好像玫瑰的花瓣,但都挤在一起给轧碎了,或者像筑巢那样给编了缏。成百上千不能成茶的碎枝细末——这是药剂师可爱的浪费——在制作药茶时是得弃之不用的,但它们却给我带来了莫大的喜悦,我犹如在一本书里意外地看见了熟人的名字那样,惊奇地发现它们都是真正的椴树茎梗,就跟我在车站林荫道上看见的椴树是同样的东西。这些椴树茎梗看上去之所以变了样,恰恰是由于它们并非仿制品而是真货,只是放置时间久了的缘故。每种新的形态都是从旧的形态衍化而来的,我从那些灰不溜秋的小球身上,认出了当初尚未绽开的嫩绿骨朵儿的影子;尤其是那片月光也似的柔和的粉红光泽,在干茎枯梗之林中,把小朵金色玫瑰般的挂在林梢的花儿衬托得格外分明——这是一种标记,就像一绺微光照在墙上原先有过壁画的地方那样,显示出椴树一度色彩鲜艳的部位和原本就没有颜色的部位的差异——让我明白了,这些花瓣就是那些在装进药袋之前,曾经在春天的夜晚散发出馨香的花瓣儿。这片红红的烛光,依然是旧日的颜色,只是已经半明半灭,光影幢幢,俨然是今日花事衰颓的景象了。再过不一会儿,姑妈大概就要把一块玛德莱娜小点心浸到她尝过的那些残花枯叶的热气腾腾的椴花茶里去,等完全泡软后给我尝一口了。

Dans la chambre voisine, j'entendais ma tante qui causait toute seule à mi-voix. Elle ne parlait jamais qu'assez bas parce qu'elle croyait avoir dans la tête quelque chose de cassé et de flottant qu'elle eût déplacé en parlant trop fort, mais elle ne restait jamais longtemps, même seule, sans dire quelque chose, parce qu'elle croyait que c'était salutaire pour sa gorge et qu'en empêchant le sang de s'y arrêter, cela rendrait moins fréquents les étouffements et les angoisses dont elle souffrait ; puis, dans l'inertie absolue où elle vivait, elle prêtait à ses moindres sensations une importance extraordinaire ; elle les douait d'une motilité qui lui rendait difficile de les garder pour elle, et à défaut de confident à qui les communiquer, elle se les annonçait à elle-même, en un perpétuel monologue qui était sa seule forme d'activité. Malheureusement, ayant pris l'habitude de penser tout haut, elle ne faisait pas toujours attention à ce qu'il n'y eût personne dans la chambre voisine, et je l'entendais souvent se dire à elle-même : « Il faut que je me rappelle bien que je n'ai pas dormi » (car ne jamais dormir était sa grande prétention dont notre langage à tous gardait le respect et la trace : le matin Françoise ne venait pas « l'éveiller », mais « entrait » chez elle ; quand ma tante voulait faire un somme dans la journée, on disait qu'elle voulait « réfléchir » ou « reposer » ; et quand il lui arrivait de s'oublier en causant jusqu'à dire : « ce qui m'a réveillée » ou « j'ai rêvé que », elle rougissait et se reprenait au plus vite).

Au bout d'un moment, j'entrais l'embrasser ; Françoise faisait infuser son thé ; ou, si ma tante se sentait agitée, elle demandait à la place sa tisane, et c'étais moi qui étais chargé de faire tomber du sac de pharmacie dans une assiette la quantité de tilleul qu'il fallait mettre ensuite dans l'eau bouillante. Le desséchement des tiges les avait incurvées en un capricieux treillage dans les entrelacs duquel s'ouvraient les fleurs pâles, comme si un peintre les eût arrangées, les eût fait poser de la façon la plus ornementale. Les feuilles, ayant perdu ou changé leur aspect, avaient l'air des choses les plus disparates, d'une aile transparente de mouche, de l'envers blanc d'une étiquette, d'un pétale de rose, mais qui eussent été empilées, concassées ou tressées comme dans la confection d'un nid. Mille petits détails inutiles – charmante prodigalité du pharmacien – qu'on eût supprimés dans une préparation factice, me donnaient, comme un livre où on s'émerveille de rencontrer le nom d'une personne de connaissance, le plaisir de comprendre que c'était bien des tiges de vrais tilleuls, comme ceux que je voyais avenue de la Gare, modifiées, justement parce que c'étaient non des doubles, mais elles-mêmes et qu'elles avaient vieilli. Et chaque caractère nouveau n'y étant que la métamorphose d'un caractère ancien, dans de petites boules grises je reconnaissais les boutons verts qui ne sont pas venus à terme ; mais surtout l'éclat rose, lunaire et doux qui faisait se détacher les fleurs dans la forêt fragile des tiges où elles étaient suspendues comme de petites roses d'or – signe, comme la lueur qui révèle encore sur une muraille la place d'une fresque effacée, de la différence entre les parties de l'arbre qui avaient été « en couleur » et celles qui ne l'avaient pas été – me montrait que ces pétales étaient bien ceux qui avant de fleurir le sac de pharmacie avaient embaumé les soirs de printemps. Cette flamme rose de cierge, c'était leur couleur encore, mais à demi éteinte et assoupie dans cette vie diminuée qu'était la leur maintenant et qui est comme le crépuscule des fleurs. Bientôt ma tante pouvait tremper dans l'infusion bouillante dont elle savourait le goût de feuille morte ou de fleur fanée une petite madeleine dont elle me tendait un morceau quand il était suffisamment amolli.

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